dimanche 16 avril 2017

Pourquoi n’y-t-il pas de Cochon pascal ? La faute à Moïse !             

À vous qui ne le savez pas, le Carême a pris fin il y a trois jours, jeudi dernier, juste avant la messe de la Cène du Seigneur (à laquelle vous n’êtes pas allé, je suppose, moi non plus d’ailleurs…) À cette heure précise, les cloches achèvent leur long voyage de Rome, le maigre fait place au gras (c’est à nouveau "charnage") et pour La Reynière, c’est vraiment un moment de grâce. Il peut de nouveau convoquer à sa table le plus chéri de ses compagnons : le Cochon et toutes ses variations, notamment le Jambon de Bayonne. Tout de suite ? Non, il va devoir attendre lundi. La faute à Moïse, qui a eu peut-être des qualités, mais certainement pas celle d’être un Gourmand.

Si la loi de Moïse n’avait pas élevé entre les Juifs et les Porcs un mur d’airain, nul doute que les premiers n’eussent mieux aimé faire la Pâques avec un jambon de Bayonne plutôt qu’avec un Agneau de Bethléem.

C’est une évidence : la Chrétienté aurait bien plus d’attrait si elle faisait la promotion du Jambon de Bayonne plutôt que de l’Agneau de Bethléem car cuisiner l’Agneau, c’est faire acte de barbarie dans les pâturages et preuve de mauvais goût à table…

Le meilleur quartier d’Agneau n’est qu’un fade madrigal, comparé surtout à ces savoureux jambons de Bayonne pleins d’esprit et de sel, et que l’on peut comparer à une épigramme excellente… N’est-il rien de plus barbare que d’arracher cette innocente bête des bras de sa mère, dont elle suce encore le lait, pour en faire un insipide rôti ? Attendons au moins qu’il soit devenu mouton : sa destinée, comme nous l’apprend un vieux proverbe, est alors d’être croqué, mangé, et nous lui ferons alors cet honneur. 

… tandis que le Cochon ! Ah, le Cochon !

Le mérite du cochon est si généralement reconnu ; son utilité en cuisine est si profondément sentie, que son panégyrique est ici superflu. C’est le Roi des animaux immondes : c’est celui dont l’empire est le plus universel, et les qualités les moins contestées ; sans lui, point de lard, et par conséquent, point de cuisine ; sans lui, point de jambons, point de saucisses, point d’andouilles, point de boudins noirs, et par conséquent, point de charcutiers. Les médecins ont beau dire que sa chair est indigeste, pesante et laxative ; on laisse crier les médecins, qui seraient bien fâchés qu’on les écoutât, car le cochon est, sous le rapport des indigestions, l’un des plus beaux fleurons de leur couronne.

Conséquence pratique : comme on se goinfre d’agneaux pendant quatre jours, il va falloir attendre demain (lundi) pour que les charcutiers soient à la fête. Mais quelle fête !

Alors, à demain, si vous le voulez bien…

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